Tilla, quand l’artisanat textile côtoie la cuisine locale – Inde

Nous continuons notre séjour à Ahmedabad avec un nouvel élément à gérer : Louna est malade. Il faut freiner un peu sur la cadence et sur les épices… L’Inde est un pays qui sollicite tous nos sens et notre attention en continu, et ça finit par pomper notre énergie.
Alors je m’assure que Louna a tout ce qu’il faut et je la laisse se reposer, l’heure du rendez-vous approche ! C’est une première, je me rends seule au Café Tilla où nous avions pris rendez-vous avec Aratrik, fashion designer à la tête de la marque Tilla.

Une passion transmise dans ses collections

Aratrik est diplômé de la National Institue of Design de Ahmedabad, école jouissant d’une renommée mondiale et d’ateliers très équipés. En sortant de l’école, il a créé sa marque de vêtements, Tilla.

Quand il nous invite à le rencontrer, c’est jour férié en Inde. Pourtant, il travaille et une partie de son équipe aussi. Une cliente passe faire quelques essayages et me confie qu’elle n’achète plus aucun vêtement, sauf ceux d’Aratrik.

Entre deux explications, il prend son crayon et jette sur le papier des idées pour ses prochaines collections. Il est passionné et parle avec amour de ses productions.

Tilla est une marque de vêtements aux tons doux. Aratrik explique qu’il travaille sur la mise en valeur des savoir-faire traditionnels textiles indiens. Il achète a des artisans de plusieurs états d’Inde des tissus qu’il ennoblit ensuite avec son équipe dans ses propres ateliers. Des artisans brodeurs et des tailleurs travaillent de concert pour transformer ces tissus en vêtements très délicats.

Des préoccupations durables au sein du monde de la mode

Tilla fait partie de la scène de la mode indienne. La marque est présente aux Fashion Weeks, et quand on évoque ce nom à des étudiants de la NID, des étoiles traversent leur regard. Aratrik fait bien partie du monde de la mode mais ne veut pas pour autant céder à tous les aspects sombres de cette industrie. Il a à cœur de créer des vêtements que les gens portent au quotidien aux couleurs et aux formes qui ne se démodent pas. Les motifs et les coupes évoluent doucement d’une collection à l’autre et restent intemporels, dans une esthétique indienne.

Ce que nous retenons surtout c’est qu’il utilise le site chutes de ses anciennes collections pour créer les nouvelles ! Les déchets de la fast fashion sont bien loin des productions Tilla !
Pour être plus clair dans ses explications, il ouvre une petite pièce… et la caverne d’Alibaba se dévoile dans toute sa splendeur. Les restes de coupes des anciennes robes attendent ici d’être utilisées dans de nouvelles créations, uniques. Les couleurs et les dimensions varient, certains coupons sont triés d’autres le seront bientôt… Et on sait bien que ce genre de rangement n’est pas évident

C’est donc aussi de cette façon que l’esthétique de la marque ne change pas du tout au tout d’une collection à l’autre. En utilisant des pièces de tissu des anciennes tuniques, pantalons et robes, on retrouve des couleurs, des imprimés, des broderies des anciennes collections qui continuent d’exister dans la ligne Tilla. Aratrik utilise beaucoup la technique de l’appliqué pour utiliser les chutes les plus petites et créer ainsi des pièces uniques.

Un espace de vie et de promotions de la création locale

Les ateliers de Tilla ont déménagé il y a peu pour permettre de développer de nouveaux espaces : le café et la boutique. Aratrik a installé son bureau et ses ateliers textiles juste au dessus de ces deux nouveaux espaces de vie.

C’est avec un ami qu’il s’est associé pour créer cette nouvelle branche Tilla. Ensemble, ils ont pensé à un espace de détente où les habitants du quartier – et les étudiants de l’école de design qui travaillent juste à côté – peuvent se retrouver pour boire un café ou manger un bout. Et cela répondait bien à un besoin du quartier car le café est plein ! Certains étudiants travaillent sur des projets de design, d’autres savourent un jus fait maison, et d’autres discutent autour d’un déjeuner tardif fait de produits frais. Le cuisinier raconte qu’il n’a pas pour ambition de servir une cuisine typiquement indienne ou typiquement occidentale. Il fait comme il a toujours fait à la maison, des plats avec des produits sélectionnés et assemblés avec amour. Quand on lui demande pour quelle raison ce café restaurant participe à l’aspect durable de Tilla, il répond « Les gens aiment manger. Alors moi je leur propose des bonnes choses à manger. » C’est évident.

En bas des marches, on croise des étudiants de l’école de design qui présentent des produits à vendre.

Cette boutique est un espace qui a été pensé comme une vitrine. Il ne s’agit pas de vendre les créations Tilla mais de mettre en valeur les créations de jeunes designers et artistes. On ne voit donc pas de robes, mais des objets en bambous, des bijoux faits à la main ou encore des masques artisanaux. Cet espace de dépôt-vente cherche à promouvoir les pratiques et savoir-faire locaux des créateur.ice.s locaux.ales.

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